PRÉNOM/PSEUDO ◭ Paradox / Sushi. ÂGE ◭ 17 ans toutes mes dents o/. COMMENT ES-TU ARRIVE SUR LE FORUM ◭ A l'origine, c'est la faute à Pi. Elle me l'a montré, parce qu'elle cherchait son pseudo. Et puis je lui ai dit que je le trouvais superbe *w*. Et elle m'a harcelée pour que je vienne @ww@ *bam*. Et puis j'ai fait mon perso mais il m'inspirait pas. Donc j'ai changé et puis me revoilà .w. TON AVIS SUR LE FORUM ◭ Une perle ♥. CREDIT ◭ Deviantart. UN DERNIER MOT ◭ Je vous aime **. Et je suis désolée de faire mon embêtante comme ça à revenir avec un perso différent ;__; CODE DU RÈGLEMENT ◭ Ok par le Russe ♥

Ce n'est pas qu'elle est malheureuse d'être ici. Mais c'est un affreux malentendu. En deux secondes, tout ce en quoi elle croyait s'est effondré, à une exception près peut-être. Mais cette exception n'était pas suffisante à la sauver. Si elle se retrouve ici, ce n'est certainement pas de son plein gré. Bien au contraire. Elle a été brusquement arrachée à tout ce qu'elle avait pour être cloîtrée dans cet endroit avec ces... Fous. Il n'est donc pas très difficile d'imaginer ses sentiments envers cet endroit, vous pouvez bien vous représenter ce que peut penser un être innocent dans un lieu pareil. Oh, certes, elle n'est pas non plus entièrement pure et naïve. Elle a son petit caractère, ses souffrances, ses sales périodes. Ce qui va lui manquer, dans son ancienne vie ? Des tas de choses. Son piano. Son équipe de roller derby. Le petit studio d'enregistrement où elle se réfugiait pour changer ou jouer un morceau, seule ou avec son meilleur ami. Ses études lui manquent. Sa famille lui manque. Mais la vie est ainsi faite. Elle ne peut pas passer ses soirées entières à pleurer sa présence à Falkenberg. C'est peut-être une nouvelle vie qui commence. Elle a eu le droit de récupérer tout un tas de trucs, et elle prévoit de se faire un nid douillet bien à elle. Qui ne la protégera probablement pas des gros méchants psychopathes qui peuplent la ville, mais qui au moins lui donnera une sensation de familiarité et de réconfort. Elle va survivre dans cet endroit. Parce que son meilleur ami l'a rejointe, même si c'est bien contre leur gré à tous les deux. Elle n'est plus seule. Et dans le pire des cas, elle peut toujours s'enfermer dans son appartement et chanter. Ou enfiler ses patins à roulettes et s'évader dans les rues à l'heure où les fous dorment... Elle n'a pas le choix. Elle est coincée ici. Elle ne peut qu'être elle-même, essayer de trouver des gens dans des situations semblables à la sienne, et pourquoi pas tenter de faire reprendre raison à des gens peu atteints. Pourquoi pas se lancer ce genre de défis après tout ? Qu'a-t-elle à perdre, maintenant qu'elle est cloîtrée ici avec pour seul futur l'attente d'une libération improbable ? Ne pas regretter. Aller de l'avant. Vivre, le peu de temps qu'il lui sera accordé. Survivre dans cette ville de fous.

CHAPITRE 1

« Allez, donne-moi ton croissant. » « Mais non je te dis ! » La petite fille pressa contre elle le sachet contenant la viennoiserie toute chaude. Son interlocuteur poussa un grognement énervé, avant de lui arracher de force, lui tirant involontairement un petit cri d’animal apeuré. « C’est bon, tu t’en achètera un autre, p’tite bourge que tu es. » Aussitôt, les larmes montèrent aux yeux de la fillette, tandis que le bout de chou haut comme trois pommes qui se prenait pour la terreur du bac à sable tournait les talons. Restant sur place comme une idiote, blessée, les larmes se mirent à couler sur les joues de l’enfant. Elle ne comprenait pas pourquoi les gens méprisaient toujours de la sorte ses parents et leurs moyens financiers. Elle ne s’en vantait nullement, mais lorsque les gens passaient devant la maison des Malone, le doute sur leurs fonds ne subsistait pas longtemps. Et même si aucun membre de la famille ne prônait la richesse dont ils étaient pourvus, les gens arrivaient quand même à les mépriser. La différence engendre la haine, c’était un fait bien connu. Mais ce n’était pas grave. Les parents Malone avaient décidé de déménager aux States, afin de rejoindre la famille qu’il leur restait. Leurs jours dans cette petite banlieue de Dublin étaient comptés. Ce qui n’était pas pour déplaire à Genesis et à son frère aîné, Gabin. Tous deux en avaient marre. Mais pas pour les mêmes raisons. Gabin était un garçon plein de caractère, de trois ans et demi son aîné. Il n’avait jamais eu aucun mal à se faire une place et à ne pas se faire marcher sur les pieds. Il ne se vantait pas non plus, et de loin même. C’était un jeune garçon aimable et poli, un véritable gentleman, protecteur envers sa cadette. Qui avait bien besoin de lui, étant bien plus la victime du bac à sable qu’autre chose. Les autres enfants passaient leur temps à l’embêter. Comme si c’était drôle. Comme s’ils allaient pouvoir faire ça indéfiniment, se moquer d’elle, et la ridiculiser devant le plus de personnes possibles. Bientôt, elle allait partir, et une nouvelle vie commencerait alors pour la petite crevette de 7 ans. « Esi ! Pourquoi tu pleures ? » La fillette se tourna vers son grand frère, qui accourait, après l’avoir vue plantée en plein milieu de la rue en pleurant. Il la prit dans ses bras, tandis qu’elle s’effondrait. Pas que pour son croissant. Pour tout ce qu’elle vivait, à longueur de journée, toutes ces humiliations qui faisaient plaisir à ces abrutis. Elle était en train de se renfermer sur elle-même, lentement mais sûrement, d’accumuler une rage et une haine qu’elle s’efforçait de ne pas rendre palpables. Gabin sentait que quelque chose commençait à aller de travers chez elle. Il pressentait le début de quelque chose que beaucoup allaient probablement haïr. Mais que pouvait-il faire, hormis la protéger au maximum ? Il ne pouvait être partout à la fois. Et elle se taisait de plus en plus sur ce qui lui arrivait. Elle n’en parlait plus, et les agressions se multipliaient, même mineures – aux vues de l’âge qu’elle avait. Il avait simplement peur qu’avec le temps, ce soit de pire en pire. « Tu peux m’en parler, tu sais… » « Je sais… » Doucement, la petite s’essuya le nez d’un revers de manche. Ses jolis cheveux de jais se posèrent contre le torse de son grand frère. Ils allaient partir en Amérique. Ca, personne ne le savait. Et c’était tant mieux.

CHAPITRE 2

« Esi ! » Aussitôt, la fillette s’arrêta nette, laissant glisser ses doigts à bas du piano. Le chant et la mélodie qui emplissaient la pièce s’étaient tus, mais une toute autre chose résonnait. Mme Malone tendit un paquet à sa fille, s’asseyant sur un petit tabouret,  à côté du piano. Genesis était une jeune fille très versée sur la musique, et ce depuis toute petite. Mais leur arrivée aux Etats-Unis, leur emménagement dans une belle villa assez loin de la banlieue de Seattle, le début de sa nouvelle vie… Toutes ces choses avaient contribué à la rapprocher un peu plus de la musique. La musique qui, selon ses dires, ne pouvait mentir. Elle pouvait tout laisser transparaitre, à quelque instant que ce soit. Raison pour laquelle elle s’y plongeait corps et âme. Les Malone étaient tous musiciens, et Félicia avait une voix extraordinaire, voix dont avait hérité sa fille. Personne ne répugnait à l’entendre chanter, même si c’était parfois usant de toujours entendre les mêmes mélodies lorsqu’elle avait une chanson en tête. Les parents de Genesis avaient fait installer dans leur sublime maison un petit studio, style studio d’enregistrement, à l’intérieur duquel tout le monde pouvait se lâcher sans que personne d’autre dans la maison n’entende quoique ce soit. Un véritable bonheur pour Genesis, qui y passait des heures enfermées, à savourer les notes qui sonnaient une mélodie si douce à son oreille. Elle avait fait sa première crise de bipolarité il y avait maintenant trois mois. La vie à Seattle, lorsqu’ils étaient arrivés, avait tout d’abord été un peu plus heureuse. Mais c’était à croire qu’elle avait une tête de victime, et qu’elle était faite pour se faire embêter. Pendant plusieurs années, à nouveau, elle avait souffert en silence de multiples humiliations. Son frère ne pouvait pas toujours être derrière elle, et ses parents étaient trop occupés pour se soucier d’elle. La méprise préférée de ses camardes résidait dans le fait que les Malone étaient une famille de végétariens. C’était dans leur éducation, les parents avaient élevé les enfants ainsi, en leur donnant tout de même la possibilité de manger de la viande s’ils le désiraient. Mais si Gabin était retourné à un régime normal avec le temps, Genesis, elle, ne supportait pas l’idée de la viande. Pauvres animaux. Ce qui lui avait valu de multiples embêtements. Mais un jour, lorsqu’un garçon de sa classe l’avait attrapée dans un coin pour essayer de lui faire manger de la viande de force, tout en se moquant d’elle, après avoir tué une petite souris sur ses yeux, tout ce qu’elle avait accumulé au fur et à mesure des années avait éclaté sous la forme d’un changement brutal de personnalité, d’une crise de bipolarité, et tout son petit monde s’était effondré. Elle avait blessé l’adolescent, et elle ne s’en était pas remise d’avoir pu faire du mal à quelqu’un. Depuis, elle ne sortait quasiment plus. Pour aller en cours, et rien de plus. Malgré leurs absences trop régulières, Mr et Mme Malone avaient remarqué ce mal-être chez leur fille. Et ils avaient décidé de faire quelque chose. De l’aider. Esi s’empara doucement du paquet que lui tendait sa mère. Elle défit l’emballage, et ouvrit la grosse boîte, découvrant une paire de patins à roulettes. Un sourire naquit sur son visage de jeune adolescente de quinze ans. Ils étaient beaux. Ils lui donnaient envie de sortir, de les enfiler, et d’essayer de patiner. La dernière fois qu’elle en avait fait, c’était à Dublin. Et étrangement, elle avait envie de réessayer. L’autre au fond d’elle ne s’y opposerait pas. Tant que personne ne lui faisait de mal, elle ne dirait rien… « Ils te plaisent ? » Esi s’accrocha au cou de sa mère, lui déposant un baiser sur la joue. « Ils sont magnifiques, je les essaye dès cet après-midi. » Le pire ? Sa mère croyait qu’elle se forçait pour lui faire plaisir, alors qu’elle était tout à fait sincère.

CHAPITRE 3

 
« Mon dieuuuuuuuu ! Il est magnifique ! » Elsa souleva les petits cheveux qui retombaient de la queue de cheval de son amie. Genesis se laissa faire, sourire aux lèvres. « Tu trouves ? » Once upon a time. Les quatre mots étaient tatoués sur la peau de la jeune femme dans une superbe calligraphie, passant comme un collier le long du haut de sa nuque. Elsa avait les yeux qui brillaient, tout en contemplant la finesse du travail du tatoueur. « Donne-moi son nom, je crois que j’irais me faire tatouer chez lui, c’est vraiment super bien fait. » Esi eut un petit rire, se dégageant de la prise de son amie. « Plus tard. Pour le moment on a une bande de dindes à faire pleurer. » Elles se jetèrent un regard complice, et éclatèrent de rire. En deux trois coups de patins, elles étaient aux côtés du reste de leur équipe. La jeune fille enfila son casque, ajustant le reste de ses protections, fredonnant une chanson. Elsa reprit en cœur, et elles augmentèrent le volume sonore, jusqu’à ce que leur capitaine d’équipe ne les rabroue fermement. Souriante, Genesis continuait de fredonner, sans faire trop de bruit pour ne pas interrompre les recommandations de dernière minute. Puis, suivant ses camarades, elle prit place sur la piste. Voilà maintenant deux ans qu’elle faisait du roller derby. Elle avait mis très longtemps à se décider à s’engager dans ce sport, mais elle ne regrettait vraiment pas que son frère l’ait inscrite aux sélections sans lui demander son avis. Elle avait été prise. Depuis le jour où sa mère lui avait offert ses patins à roulettes, elle les avait enfilés dès que possible pour se balader, véritable mordue des petites roues. Elle avait pris des gamelles monumentales, mais c’était un tel soulagement de filer comme le vent sur les trottoirs qu’elle en avait vite oublié les inconvénients. Elle n’avait pas voulu faire de roller de course. Trop violent. Au lieu de ça, elle se retrouvait à faire du roller derby. Qui n’est absolument pas un sport violent, voyons. C’est juste un sport de contact. Mme Malone avait très légèrement  maudit son fils en voyant sa petite crevette revenir toujours couverte de bleus. Malgré tout, elle avait le sourire aux lèvres. Du haut de ses dix-huit printemps, belle comme le soleil, talentueuse aussi bien en musique que dans ce sport, la vie de la petite Esi s’était clairement améliorée. Elle était toujours bipolaire, mais elle avait clairement remarqué qu’avec la férocité demandée par son sport, sa deuxième personnalité n’avait plus réel besoin de se manifester. Ses crises avaient diminué de manière fulgurante. C’était un soulagement pour elle-même, d’autant plus que l’affermissement de son caractère lui faisait un bien fou. Elle continuait de passer son temps à chanter, mais était passé à un registre plus moderne, plus rock. Le piano avait été très légèrement laissé de côté, et la petite hippie avait trouvé quelques amis qui aimaient tout autant la musique qu’elle. Elsa notamment, était la choriste du groupe, ainsi que la bassiste. Et il y avait deux garçons, Tony à la batterie, et Alex à la guitare. Ils n’avaient pas officiellement de groupe. Ils s’éclataient juste dans le petit studio des Malone, à se taper des délires gros comme eux quatre réunis. C’était une vie calme et paisible pour quatre futurs étudiants, qui se verraient bientôt envoyés aux quatre coins du pays. La vie défilait sous leurs yeux sans qu’ils puissent l’attraper. Ils en profitaient au maximum. Genesis sortait avec Tony, Elsa avec Alex. Un petit paradis que rien ne pouvait altérer. Rien, hormis peut-être la fin de l’année qui approchait à vitesse grand V. Les membres des deux équipes s’élancèrent sur la piste. La musique leur explosait dans les oreilles. Esi était restée en retrait, jammeuse de son équipe. Elsa était dans le pack, à fond. Dans les spectateurs, Tony et Alex criaient leurs noms. Le jam battait son plein. Plus qu’une minute trente. Soudain, une des attaquantes adverses bouscula violemment Genesis. Celle-ci tomba, se faisant percuter par quelques autres patineuses qui lui passèrent par dessus, certaines lui donnant des coups de pieds en manquant de tomber, se rattrapant in extremis. Il y avait pénalité, l’attaqueuse avait usé de l’avant-bras, chose interdite. Le jam fut aussitôt interrompu, tandis qu’Elsa glissait jusqu’à son amie pour l’aider à se redresser. Esi secouait doucement la tête, un peu perdue, désorientée. Elle retrouva rapidement ses esprits, plaquant une main sur son nez qui s’était mis à saigner sous le choc avec les patins d’une de ses adversaires. « Bordel, elle t’a pas loupée, chérie. » Genesis grimaça. Le sang glissait entre ses lèvres, goût extrêmement désagréable. Elle apercevait Tony, scotché contre la barrière, mort d’inquiétude pour sa petite amie. Elle détourna aussitôt le regard, tentant de se relever. Mais une vive douleur l’en empêcha. Elle poussa un cri bref, retombant sur les fesses. L’arbitre siffla le changement de joueur, tandis que le médecin présent sur les lieux accourait pour examiner l’épaule de la jeune femme. Bilan ? Clavicule cassée. Les gens n’avaient absolument aucune délicatesse dans ce sport. C’était maman Malone qui allait encore hurler. « Faut que j’y retourne, ma belle. J’vais lui foutre une dérouillée pour te venger, t’en fais pas pour ça. » « J’te fais confiance. » Esi adressa un sourire pâle à son amie. Elsa lui tapota la joue, repartant vivement rejoindre le reste de l’équipe, tandis que le médecin commençait à immobiliser son épaule blessée. Flûte. C’était terminé pour la saison, le roller derby. Sa mère allait être contente, elle allait enfin pouvoir se concentrer sur ses études et les concours pour aller en médecine l’année prochaine.

CHAPITRE 4

« Mon cœur ? » Pleine d’énergie, Genesis passa sa tête hors de la cuisine, jetant un coup d’œil à la porte d’entrée, qui venait de grincer. Elle aperçut de dos la silhouette de son petit ami, Steve. Un grand sourire naquit sur ses lèvres. Elle sortit de la petite pièce, allant à sa rencontre. « Tu as passé une bonne journée ? ♥ » Alors qu’elle allait se coller contre lui, l’enlaçant par derrière, il se retourna brusquement. Elle eut un léger mouvement de surprise, et recula, le lâchant. Il effleura à peine ses lèvres avant de la contourner, sans lui répondre aucunement. Il alla s’installer sur le canapé, enlevant ses chaussures pour les laisser trainer par terre. Elle se racla doucement la gorge mal à l’aise. Il empestait l’alcool. Encore. S’approchant de lui d’un pas hésitant, elle se mit à se tordre les doigts un peu dans tous les sens. « … Chéri ? » « Quoi ? » Il leva les yeux vers elle, agressif. Puis, la voyant si fragile et fluette, il se leva, avec un soupir, la prenant dans ses bras. Elle s’y pressa, tandis qu’il s’excusait. « Désolé bébé… » « Tu as encore bu… » « Et alors ? » Le ton était brusquement redevenu agressif alors qu’il s’écartait d’elle pour aller dans la cuisine. Elle se mordilla la lèvre, consciente de l’avoir irrité. Néanmoins, l’alcoolisme commençait véritablement à devenir un problème pour Steve. En temps que sa petite amie depuis maintenant près d’un an et demi, elle se devait de faire quelque chose. Leur parcours avait été assez chaotique. Ils s’étaient rencontrés dans un petit bar de Chicago, où elle faisait un karaoké avec une de ses amies de fac, Elena. Il l’avait regardée chanter, et ne l’avait pas quittée des yeux de la soirée. Elena l’avait remarqué avant Genesis, et elle lui avait signalé la touche. Vers la fin de soirée, Steve était venu, et lui avait donné son numéro de téléphone. Ils s’étaient revus peu de temps après, et avait sympathisé très vite, avant de se mettre sans plus tarder ensemble. Au bout de quatre mois, Steve n’avait plus pu cacher ses problèmes à sa petite amie, qui avait alors découvert la profondeur du gouffre financier dans lequel il était lors d’une soirée plutôt banale où il était venu toquer chez elle avec ses affaires en déclarant ne plus avoir d’appartement. Il s’était installé chez elle sans qu’elle ne s’y oppose une seule seconde, trop heureuse que celui qu’elle pensait l’amour de sa vie vive enfin avec elle. Et puis il avait perdu son travail. Etait devenu un gros mollasson, qui ne faisait rien pour s’en sortir, vivant paisiblement sur les moyens de sa petite amie, qui bossait dans un bar en plus de ses études, et en plus d’avoir continué le roller derby. Il se satisfaisait très bien de cette vie, mais elle n’en pouvait plus de se farcir tous les mauvais côtés, d’autant qu’il commençait à tirer un peu trop sur les sorties alcoolisées entre potes. Et que la boisson revenait chez eux un peu trop fréquemment. Elle n’aimait pas boire, elle ne buvait pas. Il commençait à se noyer dans l’alcool. Et ça lui faisait peur. Elle avait fini par le faire bouger, et lui trouver un job dans le bar où elle travaillait. Il avait d’abord refusé. Mais face à l’ultimatum qu’elle lui avait posé, à savoir qu’elle le quittait s’il ne bougeait pas pour se sortir de ce merdier, il avait cédé. Et doucement, il avait remonté la pente. Mais il avait été renvoyé, pour alcoolisme. Tétanisé à l’idée que Genesis ne le laisse tomber, il avait tout fait pour ralentir, et trouver un nouveau travail. Il y était parvenu. Mais certains soirs, il replongeait dans son addiction. Une fois, ils s’étaient pris la tête. Violemment. Au sens propre du terme, puisqu’il l’avait frappée. Il avait eu une chance inouïe : la seconde personnalité d’Esi était bien trop poussiéreuse pour ressortir. Mais la seconde fois où il avait porté la main sur elle, elle avait failli ne rien pouvoir faire. Elle s’était retenue in extremis, l’amour qu’elle avait pour lui empêchant l’Autre de sortir pour faire du mal au jeune homme.

Le son d’un verre posé sur une table et d’un liquide coulant contre ses parois fit ressortir la jeune femme de ses pensées. Il n’y avait pas besoin d’être en internat de médecine comme elle l’était pour savoir que l’alcool était pire que mauvais pour la santé. Elle fit quelques pas pour aller dans la cuisine, bien déterminée à l’empêcher de se noyer un peu plus dans son alcoolémie. « Chéri… » « Casse-toi, j’ai pas envie de recevoir tes sermons. » « Mais écoute-moi au moins ! » « TA GUEULE J’AI DIT ! » Genesis poussa un grand cri quand elle reçut le verre plein d’alcool dans la figure. Plus que l’odeur abominable qui lui imprégnait désormais cheveux et vêtements, c’était la douleur du verre lourd sur la figure qui la faisait souffrir. Le récipient était retombé au sol, se brisant à ses pieds. Se tenant le visage, la jeune femme recula, des larmes plein les yeux, sonnée. Elle s’appuya à la table pour ne pas tomber, mais il était déjà sur elle. Il la secoua comme un prunier, lui hurlant dessus, lui disant que tout était de sa faute, que si elle n’avait pas insisté il ne l’aurait pas touchée. Il finit par la lâcher, et elle tomba au sol, se rattrapant de justesse sur ses mains pour ne pas s’écrouler au milieu des morceaux de verre. Elle sentit le cristal entailler sa peau, et poussa un nouveau cri de douleur. Il se tourna à nouveau vers elle. Voyant son regard énervé, elle se releva brièvement, fuyant vers la salle de bain pour rincer ses paumes qui saignaient abondamment, criblées de verre. Mais Steve n’avait pas décidé de la laisser fuir de la sorte. Croyant qu’elle était partie appeler au secours, il s’empara de la première chose qui lui tombait sous la main, à savoir un rouleau à pâtisserie sorti une dizaine de minutes auparavant par sa petite amie pour préparer la pâte à tarte. Il se précipita vers elle en hurlant son prénom. Les mains sous l’eau, la jeune femme se mit à trembler. Il l’aperçut par l’encadrement de la porte, et se rua sur elle, l’attrapant par le col de sa chemise. « Espèce de salope ! Tu te rends compte à quel point tu m’as fait peur, à t’enfuir comme une voleuse ?! » Elle se recroquevilla sur elle-même quand le rouleau à pâtisserie s’abattit sur sa joue, la projetant au sol. Hors de lui, il multiplia les coups, alternant les endroits, avant de poser le rouleau à pâtisserie pour lui asséner un ou deux coups de poings. Après quoi il s’arrêta, hors d’haleine. Il dévisagea sa petite amie, reculant en titubant. Mon dieu. Mais qu’avait-il fait ? Roulée en petite boule, ses paumes qui saignaient toujours plaquées sur son visage pour se protéger. Il l’entendait pleurer, tremblante, luttant contre un ennemi invisible, une petite bête qui lui murmurait à l’oreille de se laisser faire et de le tuer. Mais elle résistait, encore et toujours, combattant cette espèce de bipolarité qui s’obstinait à vouloir faire d’elle un monstre. Steve laissa tomber son arme, les bras ballants, effrayé. Il se mit à pleurer, tombant à genoux pour la prendre dans ses bras. Elle se laissa faire, petite boule tremblante et apeurée. Il se mit à la bercer, s’excusant de s’être emporté. « Mon dieu, qu’est-ce que j’ai fait… Je ne voulais pas… Je suis tellement désolé… Ma chérie… Esi… Je t’aime… » Lentement, la jeune femme remua dans ses bras. Il desserra son emprise, la regardant retrouver lentement ses esprits, dévoiler son visage rouge et en sang sur la partie droite. L’hémoglobine se répandait encore davantage sur sa peau, la faute à ses paumes ensanglantées qui avaient servi à protéger son visage. Il se mit à lui essuyer le sang qui perlait de son arcade, tandis qu’elle poussait un gémissement de douleur. Il tremblait, terriblement mal, rempli de remords. « Oh, je suis tellement désolé… » Mais Genesis ne pensait pas vraiment à ses excuses. Elle était terrifiée. Demain, elle devait voir Arsène. Son meilleur ami. Il ne fallait pas qu’il la voie, pas dans cet état. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète, encore moins qu’il s’emporte. Elle le savait capable d’aller voir Steve pour régler ça, d’autant qu’il l’avait déjà vue avec un hématome dû à un des coups qu’il lui avait porté. Il allait falloir qu’elle trouve une excuse. Parce que ce n’était pas comme au boulot, où elle pouvait dire qu’elle s’était battue avec une fille au roller, ou bien qu’elle était tombée dans les escaliers. Arsène, lui, ne la croirait pas. Il saurait tout de suite ce qui était arrivé. C’était pour cette raison, en plus de la cause de la douleur, qu’elle pleurait. Elle ne voulait pas qu’il cherche des embrouilles à Steve. Elle l’aimait, elle les aimait tous les deux, et elle n’aurait pas supporté de les perdre. Ni l’un ni l’autre. Mais peut-être plus Arsène que Steve. Depuis qu’il avait commencé à vraiment lui porter des coups, elle se méfiait, même si elle lui pardonnait toujours. Elle trouvait plus souvent réconfort aux côtés de son meilleur ami. Ce que Steve ignorait. Et il valait mieux, vu la jalousie dont il était capable de faire preuve… Dieu sait quelle arme il aurait été capable d’attraper pour se débarrasser de ce petit « gêneur », de ce « rapace qui tournait autour de sa copine ». La jalousie n’était pas une preuve d’amour dans le cas de Steve. C’était purement un défaut. Et c’était ce qui effrayait le plus Genesis.

CHAPITRE 5

Esi se prit la tête dans les mains en poussant un long soupir, désespérée. Arsène était reparti il y avait une grosse demie-heure, et pas de nouvelles de Steve depuis l'incident de la veille. L'Incident avec une majuscule. Où le meilleur ami de la petite Irlandaise n'avait pas trouvé mieux comme idée de venir régler des comptes à Steve sur la manière dont il traitait sa petite amie. Il n'avait plus supporté de la voir se présenter à lui avec des hématomes sur le visage en prétextant être tombée au roller, ou autre. Il avait fait un gros ras le bol. Et alors qu'elle raccrochait précipitamment en entendant Steve lui hurler dessus comme avant chaque châtiment corporel, il avait pété son câble, avait enfilé ses chaussures, et s'était ramené, expliquant clairement à l'autre con qu'il n'avait pas le droit de la toucher. Steve avait voulu le frapper, Genesis s'était interposée. De rage, l'homme avait fait demi-tour et était parti dans la cuisine, tandis qu'elle avait tenté de faire comprendre à Arsène qu'il devait partir. Il avait déjà eu de la chance que Steve ne l'étrangle pas, d'autant plus que ce soir il était vraiment énervé. Et bourré. C'est alors que l'alcoolique était devenu. Couteau de cuisine en main. Il avait brutalement bousculé la petite Malone. Arsène avait vu la mort passer juste sous son nez, et lui laisser une plaie pas spécialement belle sur le flanc, du haut des côtes flottantes à la hanche. Steve avait retenté de le tuer, mais elle ne l'avait pas entendu de cette oreille. Et elle s'était interposée, à nouveau. Couteau en main, il n'avait pas osé lui faire de mal. Elle lui avait arraché l'arme, le menaçant avec en l'insultant copieusement. Lui disant clairement et simplement de dégager de chez elle, qu'elle ne voulait pas le revoir de la nuit. Il avait obtempéré, piteux de se faire jeter ainsi. Et elle s'était occupée d'Arsène, qu'elle avait obligé à dormir là. Il était reparti il y avait peu. Soi-disant qu'il avait à faire. Elle ne voulait pas savoir si ce qu'il lui disait était vrai ou non. S'il voulait partir, elle n'allait pas le retenir. Depuis, elle attendait, roulée en boule dans le canapé, à se morfondre. Steve reviendrait-il ? Elle l'espérait. Parce que malgré tout, elle l'aimait. Il lui en avait fait voir de toutes les couleurs. À parfois même oser la toucher alors qu'elle n'en avait pas envie, sur le coup. Ça finissait toujours bien. Mais quelque chose lui disait qu'elle ne pourrait plus encaisser ça bien longtemps. Elle avait besoin d'amour. De tendresse. Le sentiment de passion qu'elle voulait ne s'exprimait pas par les poings. Et il allait falloir qu'elle l'explique clairement à Steve. Un petit ami doit vous aimer et vous protéger. Pas devenir votre tortionnaire.

Soudain, elle entendit frapper à la porte. Elle se leva, doucement, et tourna la poignée, jetant un coup d'oeil par l'entrebâillement. Steve. Immédiatement, elle referma la porte. Mais il la bloqua avec le pied, implorant. « Ma chérie, je t'en prie, écoute-moi... » Elle poussa sur la porte. Qu'espérait-elle ? Lui fracturer le pied ? « Non ! J'ai suffisamment écouté tes excuses, maintenant je voudrais que tu les prennes en compte ! » « Je vais changer ! » Elle arrêta quelques secondes de pousser sur la porte, l'entrouvrant un peu plus. « Tu promets ? » « Je crois que cette nuit dehors m'a fait suffisamment réfléchir... Je t'aime bébé. Je veux pas te perdre, mais comme un con je ne fais rien qui puisse te donner envie de rester avec moi... » Elle fronça doucement les sourcils d'un air apitoyé. Elle ne savait pas ce qu'il avait vécu cette nuit, mais ça avait l'air méchant. Ça semblait avoir fait son effet, en tout cas. « Genesis, s'il te plaît... Je n'ai jamais aimé quelqu'un autant que toi... Je veux faire ton bonheur, je m'y suis mal pris... » Naaaaan, tu crois ? « Je te jure que je me rattraperais, laisse-moi une chance... » Les yeux rivés sur le sol, elle le sentait au bord de pleurer. Elle relâcha entièrement sa pression sur la porte. Comment pouvait-elle lui pardonner de la sorte avec tout ce qu'il lui avait fait ? « Ma puce, laisse-moi une chance, je veux me rattraper... S'il te p... » Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que les lèvres de la jeune femme se retrouvaient plaquées sur les siennes. Il eut un temps de surprise, avant de prolonger le baiser, plaquant une main sur sa hanche pour l'attirer à lui. Elle l'attira à l'intérieur de l'appartement, fermant la porte derrière eux. Il l'entoura de ses bras protecteurs, la serrant contre lui comme une poupée, si fluette, si fragile. Elle se nicha contre lui, amoureuse. « Je suis désolé pour tout... » Il plongea son visage dans les cheveux de sa petite amie. Celle-ci glissa ses mains froides sous son t-shirt pour les plaquer dans son dos, le faisant frissonner. Elle eut de la chance, le revolver glissé dans la ceinture échappa à son contact. Quoique si elle l'avait attrapé, peut-être le dénouement aurait-il été bien différent. 

On toqua soudain à la porte, à nouveau. Steve caressa la joue de l'irlandaise du bout du doigt, tendre. « J'y vais. » Mais avant même qu'il n'ait pu aller regarder de qui il s'agissait, des cris retentirent derrière le battant, intensifié par le tambourinement incessant des poings contre le bois. « GENESIS ! OUVRE TOUT DE SUITE ESPÈCE DE SALE P*TE ! » Les amants se figèrent. Steve surpris. Esi effrayée. « C'est qui ce gars ? » « Un malade, au boulot. Il est venu raide défoncé l'autre soir et il m'a fait des propositions. J'ai refusé, il a essayé de me peloter, je l'ai repoussé, et... Il n'a pas arrêté, toute la soirée, jusqu'à ce que le patron le vire... Steve... » Il la regardait d'un air protecteur. Furax. « Je vais le tuer, il ne nous emmerdera plus. » L'éclair qui passa à cet instant dans le regard de l'alcoolique fit frémir sa compagne. Un long frisson lui remonta la colonne vertébrale. « ... Steve ? » Le jeune homme s'était déjà retourné. Elle aperçut alors le revolver coincé dans sa ceinture, mis à découvert lorsqu'elle avait soulevé le t-shirt. « STEVE !  » cria-t-elle tandis que la panique s'emparait d'elle. Il ouvrit la porte, sortant son revolver instinctivement pour le braquer sur l'intrus. Aussitôt, Esi se précipita vers lui, tandis que son voyeur proférait une tonne d'insultes à l'égard de son petit ami, allant jusqu'à le menacer avec ses poings. Il ne semblait pas avoir remarqué le revolver. Ou alors il ne pensait pas le jeune homme capable de l'utiliser. Tout se passa à une vitesse ahurissante. Genesis fut sur Steve au moment où le coup de feu partit. Elle lui arracha l'arme des mains avec un grand cri, ne prenant pas tout de suite conscience que la balle était déjà fichée entre les deux yeux d'un cadavre chaud. Steve s'écarta brusquement, un éclat de terreur dans les yeux. « Oh... Mon dieu... Steve... Qu'est-ce que tu as fait... » Sans répondre à sa petite amie tremblante et effrayée, il prit ses jambes à son cou, s'enfuyant dans le couloir comme un voleur, tétanisé à l'idée que la police ne le prenne sur le fait. Esi eut beau crier son nom, elle restait seule dans le couloir, arme en main, cadavre à ses pieds. La porte de la voisine s'ouvrit. En voyant la marre de sang, la vieille femme poussa un cri strident, alertant tous les autre voisins. Genesis était figée. Non. C'était impossible. Ce n'était pas elle qui avait fait ça, ne s'en doutaient-ils pas ? Non ?! Mais l'impossible devint réalité lorsqu'un des voisins, la désarma, profitant de son état d'ahurissement, tandis qu'un autre prévenait la police. Elle se débattit. Mais rien n'y fit, la poigne de deux hommes la maintint en place. Les forces de l'ordre arrivèrent peu après. Elle n'avait rien fait. Mais personne ne l'écouterait, les preuves étaient accablantes. Alors elle se taisait. Elle était condamnée. Elle ne savait pas encore à quoi. Mais elle était innocente et condamnée à payer pour un crime qu'elle n'avait pas commis. Au moment où on lui passa les menottes, ses pensées fusèrent vers Arsène. Allait-il s'en sortir sans elle ? Oui. Il allait être fort. Il le fallait. En attendant, ils l'emmenaient.

La sentence ne tomba que quelques temps plus tard, mais elle était limpide. Et irréversible. Falkenberg.