PRÉNOM/PSEUDO ◭ lola/electric stars. ÂGE ◭ vazy, j'ai bientôt quinze ans. COMMENT ES-TU ARRIVE SUR LE FORUM ◭ y'a morpheus qui m'a kidnappé et pis il m'a montré les pilules et j'étais mode : fuckkkk, j'prends que du lsd et il m'a kickée jusqu'ici. TON AVIS SUR LE FORUM ◭ CREDIT ◭ images, respectivement : skyrock (ouyeah (a)) tumblr et tumblr. citation : la mécanique du coeur; sous-titre : leonard cohen; la fin : damien saez. UN DERNIER MOT ◭ ici. CODE DU RÈGLEMENT ◭ okéd'acc par Stojaaan.

Ce n’est pas moi qui aie fait ça.

Cela ne peut être moi. Je suis d’un naturel calme, d’un calme désarmant, d’un sourire gentil et consolateur. Je ne suis pas de cette violence, je ne suis pas un monstre de hargne.

Cela ne peut être moi.

Il énonce les faits. Sa voix est claire, pénétrante, grave, fluette. Je n’en sais rien. Je n’écoute pas. Mes yeux sont vissés dans ceux de la juge, qui hoche la tête, oui oui, il a fait ça, certes certes, il a des circonstances atténuantes, c’est jugé, c’est bon, il est coupable. Je suis coupable, plus tôt. L’avalanche de mots dans ma tête : dégradations de biens, conduite en état d’ébriété, violences, insultes envers un officier de police, refus d’obéir, trouble de l’ordre public, exhibitionnisme. Je ne me rappelle de rien. Le noir. Voilà. Le noir sur la journée d’avant, celle d’avant encore et encore avant. Je n’ai sur la rétine qu’Ariana, ma jolie Ariana, mon Ariana. Qui est partie, pouf, envolée.

Elle vaut bien quelques vitres cassées, non ?

Ils me prennent par des pincettes. Dans leurs bras, avec leurs menottes, sous leur joug, je suis le pire des criminels, le plus grand des voleurs, le fanatique des terroristes. Je ne suis qu’un gars qui ne veut pas laisser partir l’amour, qui le cherche, qui le trouve plus. Pourquoi ils se préoccupent de moi plutôt que des autres ?

Elle vaut trois buildings entiers de vitres cassées, mon Ariana.

Je ne me rappelle de rien. Ils disent que je trouverai mes égaux, les autres, les inférieurs et les supérieurs. Ils disent que je n’ai pas intérêt à faire tomber le savon dans la douche, pas la peine d’avoir peur : t’auras tout le temps d’être terrorisé là où tu vas. Je m’en fous. Je pense à toutes les vitres que je briserai, les buildings que j’érigerai pour les faire s’effondrer. Je suis le plus fanatique des terroristes. Mais on peut faire quoi, quand on a perdu son amour ?

Pas la tristesse. Je n’ai pas le droit à la tristesse. Cela ne mène à rien.

Ils m’envoient un coup de pied et je manque me rétamer. Ils me détachent, ils m’enlèvent le bandeau aveuglant. Je suis au milieu d’un village, un bien moche village. Ils s’en vont, me rappelant le coup du savon et en me disant que je ne ferai pas long feu, avec ma gueule de déterré. Je n’ai rien à perdre, tout à gagner. Je ne laisse personne derrière moi : mes amis m’ont tourné le dos, les autres n’ont jamais été là. Mes mains secourables ? Toujours inexistantes. Je n’ai aucun regret alors un sourire plisse mes lèvres, cette fille approche. Elle a les yeux verts. « T’es perdu ? », elle dit. « Non. Je cherche. »

LOVE IS NOT A VICTORY MARCH, IT'S COLD, IT'S A BROKEN HALLELUJAHLes deux étaient sur le toit, les pieds se balançant paresseusement dans le vide. L’un tremblait comme une feuille tandis que l’autre restait aussi immobile qu’une statue. « Horatio ? Tu crois en Dieu ? » Horatio était un homme bien. Il passait beaucoup du temps avec son petit voisin, celui qui s’appelait Néo. L’autre, il ne lui avait jamais adressé la parole. Néo était un garçon gentil, au sourire communicatif et à la dégaine détendue. Horatio aimait beaucoup Néo et, d’une certaine manière, veillait sur lui. La mère du petit était morte il y avait de cela un an. « Je crois en moi. » Néo a laissé son regard effleurer la pollution de Paris, pensif. « Tu ne me réponds pas. » Horatio soupira. Il trembla de plus belle, buvant une longue rasade d’eau. « Je crois en Dieu aussi. » Néo se gratta la nuque. « C’est pour ça que tu ne bois jamais le dimanche ? » On était dimanche. Cette allusion à l’alcool arracha un long frisson douloureux à Horatio, qui se força à boire de l’eau minérale en silence. « C’est pour ça. » « Mais, si Dieu existe, pourquoi le monde n’est-il pas meilleur ? » Le vieil homme lança la bouteille dans la rue, plus bas. « Parce que Néo, que Dieu existe ou non, on est seuls. »

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« Vas-tu bien, Néo ? »

Cette question est sans doute la pire que l’on peut poser à un gosse de dix ans.

A croire que cette homme ne sait ni faire preuve d’empathie ni de professionnalisme – après tout, il est psychologue et pas foutu de prendre des pincettes avec le garçon. Leurs entretiens démarrent toujours ainsi. « tu vas bien ? » « oui. » « tu m’en vois ravi. » et, alors que l’heure s’écoule, ils ne disent rien d’autre. L’arrangement était tacite. Pierre ne voulait pas se déranger à faire mine de s’intéresser à cet enfant alors qu’il pouvait si aisément jouer au solitaire ou à un autre jeu vidéo débile que les adultes aiment tant. Alors Néo se taisait et lui aussi, une mine foutrement concentrée sur la face. Cela leur allait.

Néo avait envie de crier que non, il n’allait pas bien. Il avait envie de lever son majeur, pour attirer son attention et crier : « je ne vais pas bien ! » à qui pourrait bien tendre l’oreille vers lui. Malheureusement, personne ne tendait l’oreille vers lui. Ni rien en fait. Pas même une main secourable pour l’aider. Non, il y avait juste Pierre et Horatio (et encore, en sachant que l’un était un incapable et le second un alcoolique). La seule personne sur qui Néo pouvait à peu près compter était son frère. Son père ? Perdu. Perdu dans un monde aussi étrange qu’attirant, bien pire que la mélancolie, le monde qu’Horatio quittait tout les dimanches : l’alcool. La liqueur, se justifiait-il, avait bien meilleur goût que la tristesse.

Néo n’était pas d’accord.

La vertu des épaules des autres étaient d’aspirer les larmes et d’en faire des sourires. Il aurait juste fallu que monsieur Gautier veuille bien le comprendre pour que tout aille mieux. Il ne voulait pas le comprendre.

« Oui, je vais bien. » « Tu m’en vois ravi. »

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Ils faisaient tout ensemble. Il l’amenait à son travail avec sa voiture, elle lui repassait consciencieusement ses chemises pour le lendemain. Toutes les deux semaines, il lui offrait un bouquet de fleurs saisonnières et elle souriait, faussement surprise. Une fois par mois, le premier exactement, elle lui préparait un dîner aux chandelles pour fêter ce nouveau mois ensemble. Ils avaient établi une routine lente et agréable, tendre et douce comme de la soie. Elle était belle comme une nuit d’orage et lui était la légèreté de la rosée d’un matin de printemps. Ils se le répétaient, ce sourire mièvre collé aux lèvres, avant de s’embrasser avec tendresse.

En bref, ils étaient de ces couples répugnants et follement amoureux.

Et, d’une manière générale, ils étaient heureux. A deux. Tout seul, la mélancolie venait toujours poindre le bout de son nez, dans la tête de Néo, dans le corps de Néo, dans chaque parcelle de Néo. La mélancolie était sa grande amie, une ombre noire qui l’avait guettée à de nombreuses reprises, la couvant de son regard fourbe et gentil. C’est tellement plus simple de baisser les bras, de se laisser bercer par ces bras accueillants. La tristesse, la mélancolie, Néo s’était tout interdit. Même l’amour. Ariana. Pour Néo, Ariana n’était pas de l’amour. C’était bien plus que cela. Impossible pour lui de faire comprendre cela à quelqu’un. Il fallait juste le vivre. Et Néo adorait vivre avec Ariana. Pourquoi les gens ont-ils le don de tout compliquer ? Néo aimait Ariana, Ariana aimait Néo. Sa vie ne se résumait qu’à ça.

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Elle était juste morte. Elle aurait dû recevoir une médaille. On aurait dû lui faire une marche silencieuse. Quelque chose, un hommage. Son portait sur un mémorial, des fleurs autour. Son petit regard vert souligné par les feuilles, ses cheveux bruns rehaussés sur sa plus belle photo.

L’enterrement avait pris place lors d’un jour abattu d’une pluie diluvienne, dont la noirceur était l’égale de sa tristesse.

Ce n’était pas longuement après. Jour pour jour, cela faisait un an. Douze mois. Trois cent soixante cinq jours. Huit mille sept cent soixante heures. Trente et un million cinq mille trois cent soixante mille secondes. Rien que ça. C’était trente et une million cinq mille trois cent soixante mille secondes de trop, d’après Néo. Il avait eut l’impression, petit, que la tristesse n’était qu’une affaire de cinéma. Que les gens n’étaient jamais tristes en vrai. Après tout, regardez-le à quinze ans : gentil mais perturbé, alignant cigarettes sur cigarettes, certes, mais de manière infantile, candide, gentille. Toujours avec ce petit sourire ingénu sur les lèvres. Cet air que l’on pouvait aisément lui blâmer, d’ailleurs. Nombreux furent les « tu n’as pas le droit à la joie, ta mère s’est suicidée ». Néo s’était toujours senti responsable de cela, d’ailleurs. Mais que pouvait-il y faire ? Il devait soutenir son frère, aider son père à s’en sortir, remplacer sa mère.

On n’a pas le droit à la tristesse, dans ces cas-là : la seule échappatoire saine est la joie.

Du coup, il avait partagé sa vie entre plaisirs simples, travaux forcés et abattement interdit. Jusqu’à Ariana. Là, adieu la joie, adieu la simplicité : bienvenue l’amour. Mais elle était partie, trop vite. Comme un coup de vent en hiver. Un éclair. L’éclair de sa soirée d’orage. Qu’elle était belle, sa soirée d’orage, pensait parfois Néo. Cette nuit là était triste. Un peu comme Néo. Le ciel hésitait entre son noir et son bleu, sa douleur mélancolique et son bleu triste.

Néo n’a pas hésité en claquant la porte.

La mémoire de ses yeux qui me colle à la peau
Et dans les bars du port, je cherche magie noire
Pour délivrer mon corps du sort qu'on m'a jeté
Et le sourire des filles, non, ne me fait plus rien